Une semaine après le début du couvre-feu, force est de constater qu’on a encore du mal à se faire à l’idée d’être rentrée.e chez soi à 21 heures pétantes chaque jour, et ce jusqu’à nouvel ordre – qui ne devrait pas tarder… Mais l’urgence sanitaire est là et les rumeurs vont bon train : couvre-feu encore plus tôt, week-ends interdits, reconfinement total ? Plutôt que de sombrer dans la déprime, nous avons décidé de récolter quelques conseils en joie de vivre auprès de la meilleure…
Malene Rydahl est autrice de Heureux comme un Danois et spécialiste du bonheur (oui, ça existe). Elle conseille au quotidien les plus grandes entreprises en joie de vivre (si, si, ca existe aussi). Venant du Danemark, le pays où les gens sont les plus heureux au monde malgré les journées hivernales sombres et courtes, elle s’y connait en happiness. On lui a donc demandé ce qu’on pouvait piquer à son pays natal pour tenir le coup (rude) du couvre-feu… et du reste !
Malene, on a réalisé depuis ce couvre-feu que la France est un pays d’apéro et de soirées… Un couvre-feu comme celui-ci passerait-il mieux au Danemark ?
Je dirais même que ça pourrait passer inaperçu ! Au Danemark, il n’est pas rare de dîner à 18h30, voire à 17h30 ou à 18 heures pour ceux qui ont des enfants. Mais vraiment, un dîner entre amis à 18h30, c’est tout à fait normal !
Les journées de travail sont-elles plus courtes ?
Pas du tout. On travaille de 8 à 16 heures ou de 9 à 17 heures environ, sauf que les Danois ne traînent pas au bureau. Ils n’ont pas la culture du déjeuner par exemple. Le temps passé au bureau est un temps d’efficacité. La deuxième partie de leur journée est consacrée à la vie privée. Et puis le télétravail a été instauré depuis de nombreuses années au Danemark. Il faut dire que la confiance règne : si vous devez vous occuper de votre enfant pendant une heure et reprendre le travail après, personne ne va surveiller que vous soyez vraiment derrière l’ordinateur à l’heure dite. Je ne sais pas si c’est très populaire comme opinion, mais il faudrait que les entreprises fassent un effort pour que leurs employé.e.s puissent partir plus tôt. Parce que la qualité de nos relations humaines, c’est un des éléments du bonheur… Une étude d’Harvard conduite sur 728 individus et pendant 75 ans montre que les relations que nous entretenons avec les autres nous rendent plus heureux et en meilleure santé. Si on reculait nos horaires, en se levant plus tôt et en partant plus tôt du bureau de manière autorisée officiellement, on réduirait clairement le stress social.
Comment se passe une journée type au Danemark ? Est-ce qu’il y a des étapes de journée qui ne font pas partie de notre culture mais que l’on pourrait adopter ?
En gros, réveil à 7 heures et petit déjeuner. On se rend ensuite au travail à vélo (50% des Danois utilisent le vélo comme transport principal et jusqu’à 68% à Copenhague – contre 5% en France) pour commencer sa journée professionnelle vers 8 ou 9 heures. À midi, on déjeune léger d’un fameux Smørrebrød, cette delicieuse tartine de pain noir garnie, ce qui permet de dîner tôt le soir, entre 17 heures et 18h30. Et on se met au lit vers 22 heures – si ça vous parait tôt, sachez que les statistiques sur la qualité du sommeil estiment que le sommeil le plus réparateur se situe entre 22 heures et 2 heures du matin.
On sait que l’hiver dans les pays du Nord est rude avec des journées très courtes… Y a-t-il des tips pour garder le moral quand on vit des journées comme ça ?
Les Danois sortent moins que les Français, ils sont plus à la maison et cultivent à la place le hygge (nb : se prononce “hugueuh” et définit probablement la clé du bonheur danois, la création d’une espace intime serein et douillet). L’hiver, lorsque le soleil se couche très tôt et que le pays est en déficit de lumière, le Danemark devient le plus gros consommateur de bougies au monde par habitant. On amène la lumière par le feu, et la chaleur avec. Le hygge, c’est travailler à faire une place aux relations, être présent dans le moment, se connecter à soi-même et aux autres. Il y a une sorte de mindfulness là-dedans. Ça commence évidemment par éviter de se lancer dans des débats houleux sur le couvre-feu et par lâcher son smartphone quand on se réunit – et ce, même quand on vit seul.e.
Il y a-t-il d’autres différences danoises dont nous ferions bien de nous inspirer ?
Au Danemark, on a foi en la notion de collectivité. C’est un truc très danois qui croit en l’etat providence : quand on se sent menacé collectivement, on fait les efforts nécessaires et on se serre les coudes. Les magasins, restos et écoles ont été fermés lors de la première vague, mais il n’y a jamais eu de confinement. Aujourd’hui, la situation semble sous contrôle au Danemark, en ayant simplement fait appel à la responsabilité individuelle. Nous devons réussir tous ensemble ce combat collectif contre la Covid. www.malenerydahl.comSes livres : “Heureux comme un danois” et “Je te réponds… moi non plus”