Un an enfermé chez soi, dans quelques mètres carrés payés très cher parce que situés dans une grande ville, ça laisse du temps pour réfléchir. Par exemple au fait que lorsqu’elle ferme, la ville devient dénuée de sens et que le télétravail la prive de sa raison d’être, celle qui précisément vous coûte un bras en loyer mensuel.
La crise que nous traversons a permis au monde entier de s’en rendre compte, entraînant par conséquence un exode urbain (dont on parlait déjà au printemps). C’est ce qu’on appelle le phénomène des Zoom Towns, des villes a priori pas faites pour accueillir de jeunes travailleurs urbains, mais qui deviennent pourtant des pôles d’attraction et font le plein de nouveaux habitants – pour le meilleur comme pour le pire.
Aux USA, un tiers des salariés bossent à distance et 25% télétravaillent de temps en temps, d’après Gallup. Covid oblige, ces chiffres ont augmenté (60% des employés ont fait du remote work et les ⅔ souhaiteraient continuer le faire) et avec, la question légitime du bonus/malus d’un loyer exorbitant dans une ville bondée alors qu’ailleurs la vie est belle et l’herbe plus verte. Le télétravail donne à tou.te.s l’occasion de vivre le fantasme du « je plaque tout et je me casse » sans pour autant virer hippy et renoncer à bosser dans un job cool du tertiaire, du genre de ceux qui nous ont justement attiré.e.s en ville.
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C’est ainsi que les Zoom Towns ont explosé aux USA : Kingston, NY, près de la Hudson River ; les très célèbres Hamptons, toujours dans l’état de New York ; Lewisburg dans le Tennessee et ses 12 000 habitants ; la très chic Martha’s Vineyard, îlot bordé de plages sublimes dans le Massachusetts ; le sublime Cape Cod voisin ; la spectaculaire ville de Butte dans les montagnes du Montana ; ou la Mecque deluxe du ski US, Aspen dans le Colorado. Toutes ces paisibles bourgades ont vu leur population croître récemment et leur foncier progresser jusqu’à 25%. Un point commun ? Ce sont d’ordinaire des villes de vacances, des spots où les gens aiment à venir passer du temps libre… et qui se transforment petit à petit en villes à plein temps pour ces mêmes personnes.L’idée des Zoom Towns, c’est donc de joindre l’utile à l’agréable. Ok pour vivre à la campagne, mais seulement si celle-ci ressemble à l’idée qu’on s’en fait, à savoir une jolie carte postale. Les critères de la parfaite Zoom Town ? Une ville de moins de 25 000 habitants, à moins de 15 km d’un truc sympa à voir (parc national, forêt, lac, rivière, monument…) et à 25 km environ d’une zone plus urbaine. En jetant un coup d’œil au classement des villes de France, on se dit que Cavaillon, Epernay, Cahors, Les Sables-d’Olonne, Hendaye, Pornic ou Fécamp correspondent à la description et pourraient voir, si la tendance se confirme ici aussi et on en rigole d’avance, un flot de millennials débarquer sous peu. Car ce sont eux les plus intéressés par cette (bonne) affaire d’un premier achat hors mégalopole – la moyenne d’âge des futurs potentiels acheteurs est de 38 ans.
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Ainsi, aux Etats-Unis, les prix de l’immobilier ont connu une flambée de 11,3% dans les zones rurales tandis que les loyers dans des villes ultra chères comme San Francisco ou New-York ont baissé de 15 à 31%. Un scénario idéal pour le futur ? Pour les ex-urbains sans doute, pour les habitants du cru un peu moins. Avec des prix qui augmentent, cette gentrification de la campagne n’est pas au goût de tous, sans compter les big city problems auxquels ces localités n’étaient pas forcément préparées : embouteillages, pollution environnementale, infrastructures locales sous pression… Donc si l’idée vous chauffe (et on vous comprend parce qu’elle nous démange pas mal aussi), faites ça vite avant que les prix n’augmentent trop, comme l’absurde + 50% d’inflation immobilière pour le Lake Tahoe cette année, et faites ça bien en vous incluant dans un projet de développement local (revitalisation de la ville et de ses commerces, accès au numérique, espaces de coworking, activités culturelles pour les jeunes, initiatives écolos et durables, etc…). Dans 5 ans, avec un peu de chance et en bossant bien, c’est vous qui devenez Zoom Maire !