Depuis le mois d’octobre, un nouveau symptôme lié au coronavirus a été identifié : la fatigue pandémique. Celui-ci, ne cherchez pas, on l’a tou.te.s eu.
Le monde entier est à bout, épuisé sanitairement, économiquement, mais aussi et surtout mentalement par cette histoire sans fin. Il n’y a qu’à voir les tensions qui sont apparues récemment un peu partout à propos des restrictions (car non, la France n’est pas la seule à subir ces contraintes et à s’être enfoncée dans ce marasme viral) : on n’en peut plus après 8 mois de Covid-19.
Pour l’OMS, c’était prévisible, voire inévitable. L’auguste organisme s’est fendu au début du mois d’octobre d’un rapport très clair sur le sujet, où les sages de son conseil ont écrit en toutes lettres : les gens vont forcément relâcher leur vigilance because ils pètent un plomb. Un document extrêmement intéressant qui donne aux gouvernements (suivez mon regard, je ne vise personne…) les clés d’une communication saine et transparente permettant de renouveler l’intérêt de la population pour un sujet déjà trop rebattu, dont on aimerait pouvoir ne plus jamais entendre parler. Hélas.
La fatigue pandémique est un dangereux cocktail qui mixe les clusters toujours plus présents à une apathie générale désormais bien installée. Toujours d’après l’OMS, plus de 50% de la population mondiale se sentirait concernée par ce ras-le-bol. On s’intéresse moins au sujet, on ne se sent plus trop concernés, on s’impatiente de trouver vite un vaccin quitte à le bâcler, on exacerbe une situation déjà catastrophique en relâchant notre attention et surtout on développe une immense frustration imputée de facto à nos gouvernements. Vous avez forcément autour de vous des gens qui tombent des nues à l’annonce présidentielle de ce soir ; il.elle.s ont tellement saturé.e.s qu’il.elle.s sont passé.e.s à autre chose, façon déni.
Cet épuisement collectif est une nouvelle phase très glissante pour beaucoup de chefs d’etats démocratiques qui, en cherchant à ménager la chèvre (l’économie) et le chou (la santé), ont brouillé le message et encore plus fatigué leurs citoyens. La confiance baisse et les gens perçoivent les restrictions sanitaires comme des décisions politiques. Selon une étude allemande, on estime qu’environ 10% des gens sont des “anti” bruyants – ceux qui manifestent contre les masques par exemple. Mais 20% de la population est également “anti” en douce, n’approuvant pas et ne respectant plus les restrictions pour des raisons persos, émotionnelles ou économiques. Enfin, on estime à environ 50% ceux.elles qui sont “assis sur la barrière”, à savoir ceux.elles pas fermés aux restrictions mais qu’il faut éduquer sur ces choix. Au Canada, un sondage Ipsos révèle que cette fatigue est aussi générationnelle : les Gen Z n’en peuvent plus à 57%, les Gen X à 53% et les Millenials à 50%. La jeunesse va craquer.
Mais voilà, stopper la progression du virus (qui se fait par contact humain, remember) dépend encore du changement de comportement individuel – pas seulement puisqu’on peut aussi inclure ici des entreprises refusant de passer au télétravail, etc. Et le résultat pas très glorieux de notre fatigue pandémique aujourd’hui, c’est que l’Europe enregistre désormais plus de contaminations que les USA, le Brésil ou l’Inde, et que du coup, bingo, on est reparti pour un tour de re-confinement. Et une énorme OD de Covid-19.
Alors, avec quel message les politiques peuvent-ils nous remotiver et nous exhorter à tenir bon, puisque celui du bien commun ne paraît plus assez ? La fatigue pandémique est née de la frustration légitime de ne plus pouvoir vivre une vie normale depuis bientôt un an. Autant le dire clairement : si nous voulons un jour pouvoir vaquer à nouveau libres et insouciant.es, sans avoir à faire ce stop & go infernal sur les prochaines années, c’est maintenant que ca se passe et entre quatre murs. C’est aussi simple que ça et ça parle à tout le monde. Faisons en sorte que ca marche – parce que perso, j’en peux plus.